HELPEN - ASSOCIATION RECONNUE D'INTERET GENERAL - LUTTE CONTRE LE HARCELEMENT MORAL ENTRE PERSONNELS DE L'EDUCATION NATIONALE

Fiche 10 - Le RSST (registre santé et sécurité au travail), un outil ignoré et détourné au sein de l’Éducation nationale - Appel à témoignages

Les fichiers RSST (Registre Santé et Sécurité au Travail) sont des documents obligatoires dans toutes les structures publiques, dont les établissements scolaires. En théorie, ils permettent aux agents de signaler des risques professionnels, des violences, ou des situations de harcèlement. Mais en pratique, ces registres sont souvent mis sous le tapis, traités avec négligence ou détournés pour éviter qu’ils ne nuisent à la réputation de l’établissement.

1/29/20256 min read

Le RSST : un outil ignoré et détourné au sein de l’Éducation nationale

Les fichiers RSST (Registre Santé et Sécurité au Travail) sont des documents obligatoires dans toutes les structures publiques, dont les établissements scolaires. En théorie, ils permettent aux agents de signaler des risques professionnels, des violences, ou des situations de harcèlement. Mais en pratique, ces registres sont souvent mis sous le tapis, traités avec négligence ou détournés pour éviter qu’ils ne nuisent à la réputation de l’établissement.

Pourquoi les directions d’établissement ignorent-elles les signalements ?

1. Préserver l’image de l’institution

Tout signalement formel dans le RSST constitue une preuve que des dysfonctionnements existent. Un établissement dont le registre comporte de nombreux signalements peut attirer l’attention du rectorat ou des autorités, ce que les directions cherchent souvent à éviter.

2. Éviter d’endosser des responsabilités

La prise en compte d’un signalement engage la direction à mener une enquête et à prendre des mesures correctives. L’ignorer ou en minimiser l’importance permet d’éviter d’intervenir officiellement.

3. L’absence de contrôle et de sanctions

Aucune obligation réglementaire n’impose aux chefs d’établissement de justifier leur inaction face aux signalements, faute d'un pouvoir hiérarchique suffisamment défini et cadré. L’opacité du traitement des fiches RSST est un frein majeur à leur efficacité.

4. L’abus de pouvoir hiérarchique

Un responsable académique a récemment confirmé sous couvert d'anonymat que même en cas de stress aigu causé par un supérieur hiérarchique, ce dernier ne peut être mis en cause, et la DAJ (direction des affaires juridiques) du rectorat concerné a même couvert, selon ce témoin, ces agissements en rédigeant les courriers menaçants ou intimidants du supérieur à l'attention de la victime. Une déclaration qui en dit long sur l’absence de garde-fous institutionnels.

L’inaction face aux signalements : un exemple concret

Un agent de l'académie de Paris a récemment signalé une situation de souffrance au travail via une fiche RSST remplie en 2022 (le registre n'existait pas, il a fallu batailler pour l'obtenir). Pourtant, celle-ci n’a jamais été prise en compte par la direction, ni par les syndicats, ni l'inspecteur ISST du rectorat, qui n'a jamais répondu (douze messages en deux ans). Pire, la personne ciblée par le signalement (une inspectrice) a continué ses agissements sans qu’aucune mesure ne soit prise.

Sans enregistrement ou preuve matérielle directe, il devient quasiment impossible de démontrer la nature diffamatoire d’un comportement abusif. Pourtant, les conséquences psychologiques sur la victime sont bien réelles, comme en témoignent des réactions de stress post-entretien.

Les recommandations reçues par l’agent se sont limitées à une proposition de contact avec des psychologues, une fausse solution qui évite d’aborder le fond du problème : l’impunité des responsables et l’absence de reconnaissance du préjudice subi. Deux ans plus tard, les preuves sont bien effacées. la victime subit encore et toujours.

Le détournement du RSST : un témoignage édifiant, un système de manipulation des faits identifié. HELPEN fait un appel à témoignages supplémentaires.

Dans un établissement scolaire de l'académie de Bordeaux, un enseignant a tenté d’accéder au RSST pour signaler des faits de harcèlement moral. Ce qui aurait dû être une démarche administrative banale s’est transformé en une véritable épreuve kafkaïenne. Au moins quatre autres témoignages similaires nous ont été transmis par des personnes qui nous ont contactés dans d'autres académies, dont Paris et Versailles.

- Un registre introuvable

Pendant plusieurs mois, l’enseignant a cherché à localiser le RSST. Après des demandes répétées, la direction lui a assuré qu’il était « à disposition »… sans jamais indiquer où.

- Un registre réécrit en urgence

Face à son insistance, la direction a finalement indiqué qu’un registre existait… mais venait d’être fraîchement imprimé et placé à la loge car le précédent avait mystérieusement disparu. Aucun historique, aucune trace des signalements passés.

- Une inversion des rôles

Lorsque l’enseignant a dénoncé cette anomalie, le proviseur et l’intendant l’ont accusé d’agressivité et de mensonge. Un schéma classique : plutôt que de répondre aux faits, on discrédite celui qui ose poser des questions. Avec des faux témoignages écrits à charge, montés de toutes pièces.

- Un système verrouillé

Dans ce cas précis, l’enseignant a tenté d’alerter le rectorat, espérant que l’absence du registre entraînerait une réaction. Mais le destinataire de son message a immédiatement transmis l’information au proviseur, aggravant encore plus sa situation. Le proviseur a annoté le fichier RSST en toute illégalité, en accusant le déclarant d'accusations mensongères. S'ensuivit un signalement au recteur et une convocation pour recadrage.

Le Registre de Santé et de Sécurité au Travail (RSST) est un outil essentiel dans la fonction publique française pour signaler les risques professionnels et améliorer les conditions de travail. Son utilisation est encadrée par plusieurs textes législatifs et réglementaires.

Code général de la fonction publique

Le Code général de la fonction publique, notamment aux articles L811-1 à L814-2, établit les principes généraux en matière de prévention et de sécurité au travail. Il stipule que les règles d’hygiène et de sécurité applicables aux services publics sont définies par les livres Ier à V de la quatrième partie du Code du travail, avec des adaptations possibles par décret en Conseil d’État.

Pour la fonction publique de l’État, le décret n°82-453 du 28 mai 1982 régit l’hygiène, la sécurité du travail et la prévention médicale. Ce décret précise les responsabilités en matière de santé et de sécurité, les acteurs impliqués (comme les inspecteurs santé-sécurité au travail et les médecins de prévention), ainsi que les procédures à suivre, notamment concernant le RSST.

Selon ce décret, un RSST doit être ouvert dans chaque service et tenu par les agents désignés. Ce document contient les observations et suggestions des agents relatives à la prévention des risques professionnels et à l’amélioration des conditions de travail. Les chefs de service sont tenus de formuler, en réponse, leurs observations sur ces registres.

Ainsi, le RSST est un dispositif réglementaire prévu par le Code général de la fonction publique et le décret n°82-453, visant à garantir la santé et la sécurité des agents publics en leur offrant un moyen formel de signaler les risques et de proposer des améliorations.

Illégalité et recours possibles

L’inaction face aux fiches RSST constitue une infraction aux obligations légales :

Article 3-2 du décret n°82-453 : tout signalement inscrit doit être suivi d’une analyse et, si nécessaire, d’une intervention.

Article L4121-1 du Code du travail : obligation de l’employeur d’assurer la sécurité et de protéger la santé mentale et physique des agents.

Article 223-6 du Code pénal : la non-assistance à personne en danger peut être engagée si un agent en souffrance est ignoré.

Article 121-3 du Code pénal : en cas de manquement délibéré à la sécurité, la responsabilité pénale des dirigeants peut être engagée.

Dans l'urgence, que faire ?

- Conserver une copie des signalements (photos, emails, courriers). Transmettre à Helpen si nécessaire.

- Envoyer une mise en demeure à l’administration de prendre en compte le signalement.

- Saisir le CSE et la médecine de prévention, les relancer en ajoutant Helpen aux destinataires.

- Alerter l’Inspection du travail et le Défenseur des droits. Informer l'association Helpen qui prend ce problème très au sérieux.

- Si nécessaire, porter plainte pour mise en danger ou harcèlement moral.

Conclusion : un combat nécessaire

Les témoignages le montrent : le RSST est trop souvent une illusion administrative, et ceux qui osent consigner quoi que ce soit sont rapidement mis en défaut, isolés ou accusés de "jeter l'opprobre sur la communauté éducative", selon l'expression consacrée par les harceleurs et leurs défenseurs juridiques. Lorsque le RSST est inaccessible, ignoré ou détourné, il ne protège plus les agents, mais devient une arme contre eux.

Ce constat appelle une réforme urgente. Les signalements ne doivent plus être considérés comme des menaces, mais comme des alertes vitales pour la santé et la sécurité des agents. L’opacité et l’impunité doivent cesser.

Il ne s’agit pas d’un simple dysfonctionnement, mais d’un véritable problème systémique qui doit être dénoncé et combattu.

Quid des CSE/CSA/F3SCT ?

Les Formations Spécialisées en Santé, Sécurité et Conditions de Travail (F3SCT) sont des instances issues des réformes du dialogue social dans la fonction publique. Elles remplacent les CHSCT (Comités d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) depuis le 1er janvier 2023 et sont rattachées aux Comités Sociaux d’Administration (CSA).

Elles existent à trois niveaux : ministériel, académique et départemental. Nous reverrons leur fonctionnement détaillé THEORIQUE, sur un prochain billet !

APRES RECEPTION D’UNE CINQUANTAINE DE TEMOIGNAGES MENTIONNANT LE RSST, HELPEN RECHERCHE PLUS DE TEMOIGNAGES SUR DES SIGNALEMENTS INFRUCTUEUX SUR LE REGISTRE SANTE ET SECURITE AU TRAVAIL (RSST) POUR MIEUX IDENTIFIER LES MECANISMES ET CAUSES DE L’INACTION DE LA HIERARCHIE, DES SYNDICATS, DES ISST, DE LA DRH DES RECTORATS ET DGRH DU MINISTERE, DE LA DAJ DES RECTORATS, DES SERVICES GRH ET GRH PROXIMITE DES RECTORAT, DES COLLEGUES AU SEIN DE L’ETABLISSEMENT, ETC