HELPEN - ASSOCIATION RECONNUE D'INTERET GENERAL - LUTTE CONTRE LE HARCELEMENT MORAL ENTRE PERSONNELS DE L'EDUCATION NATIONALE

Fiche 14 - L'enquête administrative dans l'Education nationale et ses limites

Comment se déroule une enquête administrative pour harcèlement moral entre personnels dans l’Éducation nationale ? Dans l’Éducation nationale, lorsqu’un cas présumé de harcèlement moral entre personnels est signalé, une enquête administrative peut être déclenchée. Si elle vise en principe à établir la vérité de manière objective, son fonctionnement actuel présente de nombreuses limites. Voici comment elle se déroule, qui peut la demander, et quelles améliorations seraient nécessaires pour garantir son équité.

Helpen

4/28/20253 min read

Comment se déroule une enquête administrative pour harcèlement moral entre personnels dans l’Éducation nationale ?

Dans l’Éducation nationale, lorsqu’un cas présumé de harcèlement moral entre personnels est signalé, une enquête administrative peut être déclenchée. Si elle vise en principe à établir la vérité de manière objective, son fonctionnement actuel présente de nombreuses limites. Voici comment elle se déroule, qui peut la demander, et quelles améliorations seraient nécessaires pour garantir son équité.

Qui peut demander une enquête administrative ?

Une enquête administrative peut être demandée :

  • Par la victime présumée elle-même, indirectement , via un signalement écrit adressé à la hiérarchie (chef d’établissement, recteur, ministre…).

  • Par le chef d’établissement qui est tenu d’agir s’il a connaissance de faits de harcèlement.

  • Par le rectorat, la direction académique ou directement par le ministère, lorsqu’ils sont saisis d’une alerte.

  • Par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (F3SCT) (les formations spécialisées en santé, sécurité et conditions de travail).

L’administration a une obligation de protection de ses agents : lorsqu’elle est informée d’un risque sérieux (harcèlement moral, discrimination…), elle doit diligenter une enquête.

Comment se déroule une enquête administrative ?

En théorie :

  1. Désignation d’un enquêteur : il s’agit souvent d’un membre de l’administration locale (RH, IEN, DRH, Inspecteur général) ou d’une personne désignée par le rectorat.

  2. Entretiens : l’enquêteur rencontre les différentes parties : victime présumée, mis en cause, témoins éventuels.

  3. Recueil de documents : mails, rapports, témoignages, relevés de faits sont examinés.

  4. Rédaction d’un rapport : il dresse un constat des faits et émet éventuellement des recommandations.

Cependant, l’enquête reste interne à l’administration. Elle n’a pas la rigueur ni les garanties d’une enquête judiciaire : les agents entendus ne prêtent pas serment, il n’y a pas d’avocat, ni de juge impartial.

Les limites actuelles des enquêtes administratives

  • Enquêtes à charge : Dans de nombreux cas, l’enquête est orientée pour protéger l’institution ou justifier a posteriori des décisions prises.

  • Absence de contradictoire réel : L’agent mis en cause n’a pas toujours accès à l’ensemble des éléments recueillis contre lui, et sa défense peut être marginalisée.

  • Manque d’indépendance : Les enquêteurs sont rattachés à la même autorité que celle qui pourrait être mise en cause, ce qui crée un conflit d’intérêts potentiel.

  • Impartialité douteuse : Dans certains cas, l’enquête vise davantage à enterrer un dossier sensible qu’à établir la vérité.

  • Pas de suspension automatique du harceleur : Même en cas de faits graves, l’agent mis en cause est rarement écarté pendant l’enquête.

Comment rendre les enquêtes plus objectives ?

Pour restaurer la confiance :

  • Faire appel à des enquêteurs externes et indépendants, par exemple des inspections interservices, ou même des cabinets spécialisés.

  • Garantir un véritable contradictoire : accès intégral aux pièces, droits de réponse, possibilité d’être assisté d’un avocat ou d’un représentant syndical.

  • Suspension préventive systématique en cas de faits graves : pour éviter toute pression sur les témoins.

  • Obligation d’informer toutes les parties du déroulé de l’enquête et de leurs droits.

  • Publication d’un résumé objectif du rapport, dans le respect de la confidentialité des personnes.

En conclusion

Aujourd’hui, dans l’Éducation nationale, les enquêtes administratives sur des cas de harcèlement moral sont trop souvent perçues comme instrumentalisées ou inefficaces. Pour sortir de cette crise de confiance, il est urgent de repenser leur cadre : transparence, indépendance et respect du contradictoire doivent devenir les piliers d’une véritable protection des personnels. Car lutter contre le harcèlement moral, ce n’est pas seulement agir sur les actes, c’est aussi refuser les silences et les dénis institutionnels.