HELPEN - ASSOCIATION RECONNUE D'INTERET GENERAL - LUTTE CONTRE LE HARCELEMENT MORAL ENTRE PERSONNELS DE L'EDUCATION NATIONALE
Compte rendu - Conférence Helpen du 21 novembre 2025
La conférence HELPEN a été un véritable succès, dans une salle comble. Chercheurs, journalistes, juristes, médecins, psychologues, délégués ministériels et acteurs associatifs ont partagé un moment d’une rare intensité, porté par un auditoire attentif et mobilisé. Un pas important dans la lutte collective contre le harcèlement moral.
Helpen
11/22/20256 min read


Conférence HELPEN – 21 novembre 2025
VIDEOS DE LA CONFERENCE EN INTEGRALITE DANS LES JOURS ET SEMAINES A VENIR
Photos : Patricia Chirot, Eric Debarbieux, la Maison de la Vie Associative et Citoyenne du 15ème, le bureau de Helpen (Laure Bourdet, Pascal Arthuis, Thierry Dinard et Guillaume Delaby)
Protéger les personnels de l’Éducation nationale face au harcèlement moral
Le 21 novembre 2025, dans une salle de conférence comble de la MVAC du 15ème arrondissement HELPEN a réuni un panel d'experts, psychologues, médecins, sociologues, journalistes, juristes, avocats et associations spécialisées pour une conférence exceptionnelle consacrée au harcèlement moral entre agents dans l’Éducation nationale, devant un public qui a rempli cette salle, un public qui l'a également remplie d'émotion lors de la rencontre-cocktail qui a suivi.
Modérée par Guillaume Delaby, président de HELPEN, la rencontre a dressé un tableau précis des violences institutionnelles subies par les personnels, mais aussi des avancées récentes et des solutions concrètes.
Une réalité systémique : souffrance, isolement et défaillance institutionnelle
La psychologue Marie Pezé (Souffrance & Travail) a rappelé que le harcèlement moral dans l’Éducation nationale est une tragédie silencieuse, responsable chaque année de nombreux suicides.
Les victimes ne veulent pas “mourir”, mais “que la souffrance cesse”.
Elle pointe la défaillance de l’institution, l’omertà, et la tendance à renvoyer la responsabilité vers l’agent (“fragile”, “trop investi”).
Les formes de harcèlement sont multiples : mises à l’écart, dénigrement, surcharge de travail, objectifs irréalistes, manque d’autonomie, injonctions contradictoires.
Les conditions de travail se sont profondément dégradées, dans un contexte de violences numériques, de tensions avec les familles, et d’un déficit criant de moyens (77 médecins du travail pour 880 000 enseignants).
Harcèlement et crise identitaire : reconstruire le “nous”
Pour Patricia Chirot (CNAM), le harcèlement s’inscrit dans une crise identitaire qui touche toute la profession.
Les victimes, oscillant entre surexposition et invisibilisation, peinent à reconnaître ce qu’elles subissent. L’estime de soi s’effondre.
Elle préconise :
d’exiger des traces écrites des entretiens et décisions,
de rester strictement factuel,
de s’appuyer sur les textes et fiches de poste,
et surtout de s’organiser collectivement entre pairs, hors de la hiérarchie : réunions, entraide, comptes anonymes si nécessaire.
70 % des enseignants déclarent vouloir quitter le métier, signe d’une crise profonde.
Accompagner, protéger, réorienter : le rôle crucial d’Aide aux Profs
Rémi Boyer (Aide aux Profs) a présenté les dispositifs permettant de protéger sa santé et d’envisager une évolution professionnelle : arrêts maladie, CLM/CLD, mi-temps thérapeutique, postes adaptés, disponibilité, détachement, reconversion.
22 000 enseignants ont été accompagnés en 20 ans, dont 15 % en situation de harcèlement.
Message central :
se déculpabiliser — c’est le système qui est malade.
Se mettre à distance, se soigner, se faire accompagner.
HELPEN complète ce soutien par des groupes de parole et un suivi des situations.
Le rôle des médias : briser le silence et faire reculer le silence institutionnel
La journaliste et grand-reporter Isabelle Forboteaux (France Télévisions), en revenant sur l’affaire de Marie-Pierre Jacquart , harcelée par sa hiérarchie après avoir signalé des agressions sexuelles au lycée Bayen de Châlons-en-Champagne, a rappelé l’importance cruciale de médiatiser les situations de violence institutionnelle et d’inaction au plus haut niveau. Comme l’ont indiqué plusieurs médias, l’ancien recteur de Reims, aujourd’hui conseiller Éducation à Matignon, Olivier Brandouy, est visé par une enquête pour non-dénonciation de crimes, mauvais traitements et atteintes sur mineurs dans un dossier de pédocriminalité.
Témoigner reste pourtant extrêmement difficile pour les personnels : devoir de réserve, pression hiérarchique, peur des représailles. La menace est souvent la même : une plainte en diffamation, visant parfois les agents eux-mêmes, mais aussi les journalistes — un point fort souligné lors de la conférence. Faut-il y voir l’inaction d’une institution qui se protège, ou la faute d’un agent détaché de sa mission de service public ? La question reste centrale.
Chez HELPEN, nous rappelons que lorsque les voies internes n’aboutissent pas, le recours aux médias devient une nécessité. Si l’ensemble de la presse était mieux informée de l’ampleur de ces situations, elle pourrait jouer pleinement son rôle : porter à la lumière un enjeu systémique encore trop invisibilisé.
Violences entre adultes et dégradation du climat scolaire : l’analyse d’Éric Debarbieux
Le sociologue Éric Debarbieux a présenté des données alarmantes :
harcèlement entre professionnels passé de 11 % (2013) à 20 % (2022),
équipes peu solidaires : 34 % (2013) → 41 % (2022),
74 % des personnels se sentent méprisés ou non soutenus par leur hiérarchie.
Il souligne que la majorité des violences dans les établissements provient d’adultes envers d’autres adultes, dans un système profondément vertical et instable (grand turnover des équipes).
Lutter contre le harcèlement, dit-il, c’est aussi lutter contre la défiance et le rejet de l’autre, et reconstruire un climat d’équipe plus coopératif. L’Education Nationale repose sur un système profondément hiérarchique, descendant et malveillant. Les enseignants éprouvent par ailleurs une forme de lassitude de la « réformite aiguë », des circulaires qui s’accumulent, induisant chez eux une perte de sens.
Les données mentionnées par M.Debarbieux sont en tous points comparables à ce que Helpen observe dans ses premières observations statistiques des adhérents, dont certaines ont été dévoilées aujourd'hui, et seront prochainement rendues publiques.
Avancées juridiques majeures : 2025, une année décisive
Les avocats Justine Bourgeois et Benoît Arvis ont présenté trois victoires historiques, qui seront détaillées dans un prochain article publié sur Helpen :
21 janvier 2025 – Orange condamnée pour harcèlement institutionnel
L’organisation du travail peut désormais être reconnue comme harcelante.5 mars 2025 – Obligation renforcée de sécurité de l’employeur
L’administration doit prévenir l’épuisement professionnel lié à la surcharge prolongée.Été 2025 – Nouvelle jurisprudence sur les accidents de service
Un choc psychologique en entretien peut être reconnu comme accident du travail ; c’est désormais à l’administration de prouver le contraire.
Les victimes doivent systématiquement demander la protection fonctionnelle et, si nécessaire, un CITIS (congé pour invalidité temporaire imputable au service), qui est illimité et donne droit à un plein traitement. Le temps judiciaire n’est pas celui de la souffrance, ceci ajoute à la souffrance engendrée par ces situations, et la réparation du préjudice subi doit aussi intégrer ces facteurs.
Prévention du suicide : un impératif absolu
Brigitte Le Hemonet, de l’ASSOSSEN, Association Stop au Suicide à l’Education Nationale, créée en 2023, a alerté sur les défaillances de l’État dans la prise en charge des situations à risque suicidaire et essaie d’en comprendre les raisons.
Bien que de nombreux dispositifs existent, beaucoup ne fonctionnent pas : postes vacants, refus d’enregistrer les alertes, RSST enterrés, absence de suivi, dédouanement de l’institution.
Des dispositifs d’écoute existent :
0805 500 005 (EAE : Espace d’Accueil et d’Ecoute mis en place par l’Education Nationale, 7j/7 – 24h/24, dans chaque académie / département ; consultations psychologiques)
3114 (numéro national prévention suicide)
www.assossen.fr : les écoutants de l’association rappellent les personnes qui se signalent sur le site et, à partir d’une « grille d’écoute », essaient d’apporter aide et soutien.
HELPEN : recenser, accompagner, protéger
HELPEN développe u questionnaire avec témoignage qui s’apparente désormais à un Registre national santé et sécurité au travail (RSST) pour mieux documenter les situations (intranet). La situation individuelle est enregistrée, les données sont étudiées en vue de publications sociologiques.
La prochaine journée nationale des adhérents aura lieu le 21 mars 2026.
L’association :
offre écoute et soutien lors de ces journées,
accompagne les victimes avec le recrutement et la formation de bénévoles,
produit des statistiques nationales,
travaille avec des partenaires experts,
contribue à faire émerger une parole collective.
Conclusion
Cette conférence confirme l’ampleur du harcèlement moral institutionnel dans l’Éducation nationale.
Mais elle montre aussi qu’une mobilisation collective — professionnels de santé, juristes, chercheurs, médias, associations — peut permettre de rompre l’isolement, de faire évoluer le droit, et de construire un réseau de solidarité capable de protéger les agents.
HELPEN remercie chaleureusement l’ensemble des intervenants pour leur expertise et leur engagement.
Solidarité, combativité
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